Avant propo SFS
50ème Congrès de la Société Française de Sophrologie
PARIS les 3 / 4 décembre 2016
Corps – Conscience – Inconscient
Intervention :
Pour une dynamique de la Conscience : De la Réflexivité à la Réflexion.
Par Yannick FRIEH
Directeur de l’Ecole de Sophrologie et de Sophrothérapie Existentielle d’Alsace - E.S.S.A.
Sophrothérapeute titulaire du CEP- Psychopraticien en Sophrologie Existentielle FF2P
Formateur - Superviseur
Avant propos…
Engagés depuis quelques années dans une nouvelle ère de mutations, nous sommes nous les êtres humains amenés à vivre en profondeur des transformations tant au niveau de nos modes de vie et de communication, qu’au niveau des valeurs sociétales, politiques, économiques et spirituelles.
De cette modernité entre autre technologique, qu’en est-il de la Liberté, de la Responsabilité et de la Dignité de l’être humain ?
« Science de la conscience et des valeurs de l’existence transcendantale de l’être », telle que la définit A.Caycedo, la Sophrologie Existentielle dans sa démarche scientifique, sa dimension phénoménologique et sa pratique vivantielle, permet d’éveiller une nouvelle forme de conscience, d’adopter une nouvelle attitude pour penser, de créer un nouveau style de pensée et ainsi tendre « à ce que les choses peuvent être autrement ».
Avons-nous conscience d’être arrivé au bout d’un monde, le nôtre ? Quel monde après la fin du monde ?
Préambule…
Avant de partager avec vous tous chers collègues sophrologues le propos de mon intervention, je tiens à profiter de cette tribune pour rendre hommage avec beaucoup de respect et d’affection à son encontre, à une figure connue et reconnue du monde de la Sophrologie, puisqu’elle a été une membre active au sein de la S.F.S., ainsi qu’une collaboratrice du Professeur A.Caycedo dans la mise en place de la formation de la Sophrologie en France avec bien d’autres éminentes personnes.
Elle a par la suite dès la fin des années 1980 créé sa propre école de Sophrologie et Sophrothérapie Existentielle à Bordeaux…reconnue en 2008 sur le plan national par la Fédération Française de Psychothérapie et de Psychanalyse (FF2P) comme méthode psychothérapeutique et au niveau européen par l’Association Européenne de Psychothérapie (EAP) dont je suis aujourd’hui le représentant français pour la FF2P.
Il y a maintenant plus de 20 ans, elle a été pour moi, à la fois dans mon parcours personnel et professionnel, une rencontre marquante et déterminante : en effet, j’ai pu expérimenter dans un premier temps la démarche sophrologique existentielle à titre personnel dans le cadre de ma thérapie, et progressivement, elle m’a transmis avec rigueur, pertinence et parfois exigence, la méthode sophrologique phénoménologique vivantielle pour être aujourd’hui moi-même un « passeur » comme elle aimait à l’évoquer dans son enseignement, à ISEBA Bordeaux et ESSA Colmar.
Passeur en tant que directeur d’école, formateur et aussi en tant que Sophrothérapeute existentiel auprès d’une clientèle de plus en plus tournée et intéressée par des approches thérapeutiques humanistes et existentielles telle que la Sophrologie.
Pour tout cela, je t’adresse un grand merci, un très grand merci à toi Danièle Raynal pour toute cette richesse partagée, ta qualité d’écoute et de réflexion…et je n’oublie pas Jacques Raynal ton époux, personnage atypique et incontournable dans nos précédents congrès pour sa touche poétique, humoristique et talentueuse de ses interventions.
Lors de la présentation du thème choisi pour cette 50ème édition de la S.F.S., j’ai de manière spontanée, intuitive et donc non réfléchie proposé mon sujet : « pour une dynamique de la conscience : de la réflexivité à la réflexion ! » à ce moment là, je n’avais pas mesuré l’étendue de mon propos et loin de moi l’idée d’en saisir clairement les tenants et les aboutissants dans son évocation future en cet instant.
Néanmoins, l’échéance approchant à grands pas, bon nombre d’évènements environnants plus ou moins récents ont éveillé en moi une direction de pensées et de réflexions à propos du monde dans lequel nous vivons, nous les êtres humains, nous qui en sommes à la fois les acteurs, les metteurs en scène mais également les scénaristes-créateurs pour Demain.
Comme le souligne Michel Serres du haut de ses 85ans, nous vivons actuellement une phase nouvelle de l’histoire de l’Humanité, la 3ème Révolution anthropologique majeure après l’écriture et l’imprimerie.
De profondes mutations s’opèrent dans nos sociétés occidentales mais aussi dans les pays dits émergeants, où les nouvelles technologies bouleversent nos modes de vie et de communication, nos façons de penser et de réfléchir le monde…ce monde que les nouvelles générations vont devoir matérialiser et réinventer, ce monde qui est encore aujourd’hui régi par des règles d’un autre temps.
C’est le poète Paul Valéry qui écrivit en 1945 dans Regards sur le monde actuel « le temps du monde fini commence ».
Les difficultés actuelles que nous sommes tous amenés à éprouver dans notre chair en y étant confrontés d’une manière ou d’une autre, de près ou de loin, qu’elles soient d’ordre social, politique, économique, mais aussi médical, ethnique, culturel, spirituel, éthique, moral et existentiel… ne marquent elles pas cette finitude d’un monde à bout de souffle, en peine d’un nouvel élan et en manque d’une énergie nouvelle pour engager cette transformation déjà opérante à ce jour, pour permettre à chacun d’entre nous de s’épanouir librement tout en sachant préserver et entretenir authentiquement le lien social et relationnel pour un mieux vivre ensemble.
De cette observation réaliste et de ce constat lucide établi par un certain nombre de spécialistes en tous domaines et loin d’être pessimiste, il nous faut y voir la formidable occasion et l’opportunité créatrice d’agir autrement en nous appuyant sur une nouvelle façon de pensée qui me semble être essentielle si l’humanité veut vivre autrement.
Certes notre monde change, il change vite, tellement vite et plus rapidement qu’hier. Mais qu’en est-il de l’individu humain et de sa mutation ?
L’homo sapiens sapiens que nous sommes se mût en vitesse accélérée en l’homo sapiens numericus, se prénomme digital native et se définit comme un individu ayant grandi dans un environnement numérique comme son nom l’indique, entouré par les nouvelles technologies
Numéricus dans sa dimension ordinaire, naturelle et adaptive doit faire face à deux défis majeurs dans cette nouvelle configuration de l’existence à savoir son rapport à l’Espace et au Temps.
Nous le savons tous car nous le vivons, l’espace et le temps sont des données incontournables de notre expérience humaine, l’une et l’autre nous sont familières et inhérentes, d’où la facilité de leur reconnaissance par nous tous, à tout moment et à chacun selon sa propre perception.
Ces deux constats physiques conditionnent notre existence d’humain, quant à notre épanouissement ou non, et à notre réalisation ou pas de nous-mêmes. La Vie a besoin de l’espace et du temps…nous avons tous besoin de trouver, voire de retrouver un espace à soi, un espace propre où nous y sentir vivant et nous avons tous besoin de nous réapproprier nos rythmes de vie biologiques et de remobiliser notre capacité à habiter le temps.
Or ces deux éléments structurants sont complètement modifiés par cette modernité technologique et les choses se compliquent lorsqu’il s’agit de remédier aux conséquences physiques et psychiques qu’engendrent ces nouvelles expériences spatio-temporelles.
C’est Albert Jacquard qui évoqua dès le début des années 2000, « la finitude de notre domaine », en attirant notre attention sur notre planète Terre, ce territoire qui n’avait plus l’ombre d’un cm2 inconnu pour l’homme explorateur que nous sommes.
En effet, nous avons marché sur l’ensemble du territoire, en avons parcouru les moindres recoins, en avons procédé l’inventaire de ses richesses et reconstitué l’histoire…l’investissement de notre territoire se meut en une concentration excessive et déséquilibrée de certaines zones de part les réalités climatiques et guerrières qu’engendrent ces sédentarisations massives. Si hier, il était possible d’envisager de trouver un ailleurs, la Lune – Mars…nous savons à ce jour et pour le moment, que nous sommes assignés à résidence sur la Terre.
Une vieille légende indienne connue de tous, ne racontait elle pas que l’homme avait traversé des océans, des terres, des mers voire des cieux pour trouver cet ailleurs mais il n’avait jamais, malheureusement pour lui, pensé à se tourner vers lui-même et y trouver son propre espace corps.
Cette quête d’un ailleurs où il ferait bon vivre et tendre à un mieux être en soi semble correspondre à cette découverte de l’être dans sa corporalité, à savoir ce travail de découverte de la région phronique que propose la relaxation dynamique sophrologique.
Dans l’intimité de nos espaces thérapeutiques de rencontres, nous accueillons et entendons ces manifestations de souffrance et d’angoisse que la plupart d’entre eux expriment au travers de leurs peurs, peurs d’un avenir incertain et menaçant, de leurs sentiments d’incompréhension de ce qui se passe autour d’eux, de leurs sentiments d’abandon à la suite de deuils, de déceptions affectives, d’échecs, de leurs incapacités à s’adapter à de nouveaux espaces de vie et de travail de manière parfois assez brutale dans l’immédiateté …tous les évènements et troubles sociaux actuels accentuent profondément leurs malaises au quotidien.
Cette défense de leur territoire, à les entendre raconter leurs vécus personnels, laisse entrevoir les mécanismes naturels de protection mis en œuvre pour survivre malgré tout, et maintenir en l’état coûte que coûte leur place, leur intégrité globale.
Ce malaise ambiant et plus ou moins permanent ne peut que laisser place à un sentiment d’insécurité, d’insatisfaction et de frustrations diverses qui illustrent des conflits en l’état entre leur idéal, leur désir et les réponses données et présentées par la réalité.
Cette région phronique qui ne demande qu’à se vivre et que permet la pratique de la relaxation dynamique de Caycedo se distingue dans la sensation de la présence dans la forme du corps, de l’espace phronique tout autour, cet espace vital qui lui-même se différencie du territoire, espace de la Terre où vit l’humanité, se différenciant luimême de l’Univers, espace cosmique.
La sophrologie existentielle vivantielle nous propose dans sa pratique à porter momentanément moins d’importance au monde auquel nous appartenons pour en éprouver la présence en soi sans pour autant nier à l’extérieur le monde que nous connaissons.
La relaxation dynamique met en pratique et en action la bidirectionnalité de la conscience portée par la réduction phénoménologique proposée par Husserl.
Cette installation dans la présence à l’expérience comme le décrit parfaitement Michel Bitbol dans son livre « La conscience a-t- elle une origine ? » est une systématisation de la conscience réflexive qui suppose en amont l’accomplissement de l’époché, la suspension du jugement ou de la croyance à propos des objets d’expérience.
L’époché nous affranchit de notre attitude naturelle, habituelle et routinière à l’égard des choses, nous distancie momentanément de nos idées reçues sur la réalité et nous permet de relativiser certaines de nos représentations trop dominantes et écrasantes.
Ce pas de côté ou plus précisément ce changement de type d’attention que le sujet porte aux choses comme l’évoque Gérard Thouraille, est aussi de ce fait « un changement dans le type d’attention que le sujet prête à son propre vécu » comme le souligne Nathalie Depraz.
Ce mouvement de la conscience vers soi, comme une sorte de conversion intérieure selon Robert Misrahi, vers cet univers interne que représente le corps est rendu possible grâce au rythme conscient et sensible de notre souffle mobilisé intentionnellement.
Le phénomène d’intentionnalité de la conscience décrit par Brentano se produit là dans une direction nouvelle que nous n’avions jusque là pas pleinement exploré, à savoir que la démarche phénoménologique place notre corps même au cœur de l’époché et non plus un objet quelconque du monde.
Le phénomène d’intentionnalité de la conscience décrit par Brentano se produit là dans une direction nouvelle que nous n’avions jusque là pas pleinement exploré, à savoir que la démarche phénoménologique place notre corps même au cœur de l’époché et non plus un objet quelconque du monde.
En effet, la relaxation sophrologique n’est pas une détente d’endormissement, passive et lassive. Se relaxer du monde c’est aussi se libérer du temps mondain, du temps des horloges et des menaces de Chronos.
Notre rapport au temps change car tout s’accélère, les sollicitations en tous genres foisonnent et les urgences s’enchaînent les unes après les autres…dans un monde ultraconnecté qui chamboule nos agendas, sature nos journées et virtualise nos relations …il nous faut réapprendre à vivre le temps…c’est une question de survie pour chacun d’entre nous.
Comme le lapin blanc d’Alice au pays des merveilles, nous courons après les minutes « en retard, en retard, je suis toujours en retard »…étrange constat tout de même, nous qui pensions avoir enfin le choix de tout, nous voilà à subir les affres du chronomètre comme dans « un état de famine temporelle » pour reprendre l’expression du sociologue Hartmut Rosa.
Cette course poursuite a bien entendu des conséquences aussi bien sociales, médicales qu’individuelles que nous manifestons différemment selon nos capacités propres à résister à la déferlante temporelle.
En effet, la dictature de la vitesse est devenue une norme sociale qui régit l’ensemble de nos actions, de nos attitudes et de nos comportements : c’est l’idée qu’il faut optimiser chaque minute de notre temps et cette idée s’est propagée dans tous les secteurs de la société en s’imposant aux individus, indépendamment de leur volonté.
A chaque époque son constat, mais Platon et Sénèque pointaient déjà les gens trop pressés bien que cela ne concernait qu’une petite partie de la population ( avocats-marchands).
Dès la fin du 18e siècles avec l’industrialisation et la mise en place du capitalisme, la division du travail a permis d’augmenter la productivité et l’accélération des tâches. Fin des années 1990, l’essor et le développement des nouvelles technologies ont accentué le phénomène de rapidité et d’urgence.
L’accélération contemporaine s’appuie sur le facteur psychologique du goût de la vitesse et le facteur culturel que représente l’envie de saisir toutes les opportunités immédiatement.
Mais la quête incessante de productivité du capitalisme est la cause structurelle de cette contrainte de l’urgence que subit principalement le monde du travail. Il faut produire et consommer sans interruption, dans un temps qui n’a plus rien à voir avec le temps naturel fait d’interruptions et d’alternances.
La souffrance au travail et ses conséquences sur le bien être de l’individu ne révèlent elles pas cette obsession de l’urgence qui transforme le temps ?
En effet, elle déracine le passé car elle empêche l’individu de revenir sur ce qu’il a fait ; elle dérobe le présent car toujours poussé à anticiper le coup d’après et elle atrophie l’avenir en limitant toute projection dans le futur et toute réflexion sur les voies possibles de changement.
Cette tyrannie moderne de l’urgence entraîne des processus d’aliénation de l’individu qui ne fait que réagir à une menace ou à une injonction au risque de le priver d’une dimension essentielle de sa liberté, sa faculté d’initiative.
Le temps de la réflexion et de l’esprit critique sont en danger !
L’urgence nuit également à l’exercice de la démocratie car le citoyen soumis à la norme de l’immédiateté, n’a plus la disponibilité psychique pour réfléchir à la chose publique, qu’il laisse aux politiques, eux-mêmes piégés par le court-terminisme.
Dans la Grèce antique, la skholé – le temps du loisir- était la condition nécessaire à la démocratie : les citoyens prenaient le temps de penser, pour pouvoir ensuite délibérer ensemble.
Nous avons perdu l’habitude de vivre ce temps du vide, de l’ennui et des moments de non-action que nous exprimons sous le couvert de « je n’ai pas le temps ! ».
Il faut rendre à nouveau possible un libre usage du temps, au travail et en dehors
Cet en dehors peut être accessible par la relaxation dynamique et le retournement de la conscience qui met en lumière la dimension transgressive et constructive de la métanoîa dans le sens où elle renvoie simultanément à la participation – au changement – au dépassement.
La relaxation est une réponse à ces carences que nous impose ce rapport urgentissime au temps, une manière de fuir probablement une inquiétude existentielle, la peur de la mort qui sous tend au préalable une perte de saveur à l’existence.
Intolérants à l’attente, trop réactifs à l’urgence, nous sommes contraints sous réserve de complications diverses à faire quelque chose qui nous coûte considérablement : renoncer, accepter de ne pas tout faire, savoir hiérarchiser ses actions…en d’autre terme, reconnaître une limitation à notre sentiment de toute-puissance.
Nous le savons et l’entendons au cours de nos accompagnements, la perception du temps est très personnelle car elle est fortement liée à nos états émotionnels et à notre niveau d’engagement dans nos actions. Tout est subjectif dans le cerveau humain et en cela, le temps d’un malade n’est ainsi pas le même que celui des gens en bonne santé.
La dynamique de la conscience, c’est l’éveil progressif des capacités de la conscience – à s’installer en soi – pour ensuite se redéployer vers le monde extérieur. Ce retournement permet au moi phronique de se corporaliser, de s’incarner et de temporer le temps.
L’individu n’est plus dehors – jeté au monde comme le moi de la conscience naturelle mais à présent, il lui est possible consciemment de découvrir que sa temporalité appartient à sa corporalité.
Ainsi à partir du moi du sujet, de cet être conscient qu’il est, à partir de lui-même, installé dans sa région phronique, l’acte noétique constituera et renouvellera sa conception du monde.
La démarche phénoménologique existentielle en sophrologie a pour visée l’amélioration de la qualité de la noèse, cet acte essentiel de la conscience humaine.
Alors et seulement là, l’individu percevra avec acuité « que les choses peuvent être autrement, puisque les choses sont vraiment autrement. »
Le renouveau de l’activité noétique débouche sur une conception du monde tout à fait renouvelée, dans une nouvelle création…création dans le sens de créativité de l’être humain ou plus exactement d’une création possible de par l’être humain comme le précisait Jacques Raynal dans l’une de ses interventions sur la noèse.
Seule la vivance va permettre à cet acte noétique, à ce percevoir de se faire de façon privilégiée. A partir de la vivance, l’ouverture des portes de la perception est possible.
« C’est par la création que la conscience est en mesure de se réjouir de sa propre activité »comme le souligne R.Misrahi.
Fondée sur l’intelligence intuitive, l’imagination et le renouveau de la subjectivité, la sophrologie est fondamentalement une dynamique d’éveil de la conscience, dans un sens ontique c'est-à-dire « tout ce qui va dans le sens du développement de l’être ».
Etre installé en soi, dans sa région phronique ne met pas à l’abri des soubresauts du monde, mais permet peut être simplement de le voir avec recul, pour pouvoir le penser autrement.
Dans la position du sujet individualisé, c’est là seulement qu’il est possible de donner un sens au mot Liberté.
La liberté vécue, implique la responsabilité, sentiment de dignité entraînant tout naturellement l’existence.
Cette nouvelle position d’être, de se sentir grand change tout dans la relation aux autres et au monde. C’est accepter la vie sans crainte du lendemain, sans peur des autres dans leur apparence comme du monde dans ses turbulences ordinaires.
Loin de créer des sur-hommes, la sophrologie existentielle vise au dévoilement de cette région phronique pour constituer un moi phronique tridimensionnel avec tout ce qui se donne à la Présence, avec tout ce qui peut être saisi par lui, à travers nos organes des sens.
De cette sensorialité vécue, le redéploiement se veut attentif et tourné vers l’espace phronique, cet espace de rencontre entre sujets tridimensionnels, espace de rencontre intersubjectif et propice au développement de nos capacités d’humanicité…nous permettant d’être et de vivre ensemble, en même temps d’exister dans la différence.
Cet ancrage du moi phronique dans sa région phronique dévoile le Dasein propre, cet être – le – là et tous ses possibles : l’intelligence, la connaissance et la raison sont des capacités qui font essentiellement partie de la conscience.
Ainsi, il nous faut remplacer le modèle ordinaire de la compétition, de la rivalité et des comparaisons par celui de l’émulation entre les humains… «On ne naît pas homme, on le devient » dit Erasme.
En effet, une autre source est nécessaire pour accéder à la conscience d’être : cette source ne peut être que la rencontre des autres humains. Les rencontres font de nous des humains. L’Alliance sophronique s’imprègne de cette affectivité fraternelle, qui constitue la grande force d’intégration des différentes structures de la conscience.
« Ut conscientia moscatur » est la devise proposée par Caycedo… pour que la conscience soit connue.
Chaque individu humain incarné est une conscience intuitive de son être au monde, de son existence qui porte en lui cette dimension du sensible, attentionné qu’il est de lui-même et qu’il manifeste à l’autre, un autre différent de lui-même et fait « que nous ne sommes pas des êtres humains en recherche d’une expérience spirituelle ; nous sommes des êtres spirituels vivant l’expérience humaine. » comme le dit Pierre Teilhard de Chardin.
La liberté, la Joie comme l’Amour ne peuvent se concevoir que de façon vivantielle et non pas intellectuelle, rationnelle et idéologique.
« Cette nouvelle génération - d’humains - est épouvantable. J’aimerais tellement en faire partie ! » Cette phrase redonne ainsi un autre sens aux mots d’Oscar Wilde.
Bibliographie :
- Michel Serres « Petite poucette »
- Albert Jacquard « Tentatives de lucidité. »
- Heidegger « Etre et temps. »
- Edmund Husserl « Méditations cartésiennes »
- Michel Bitbol « La conscience a-t-elle une origine ? »
- Gérard Thouraille « Relaxation et présence humaine : autour d’une expérience intime. »
- Nathalie Depraz « Comprendre la phénoménologie : une pratique concrète. »
- Hartmut Rosa « ¤ Le temps de l’Urgence. ¤ Accélération : une critique sociale du temps. »
- Christophe André « Trois amis en quête de sagesse. »
- Pierre Teilhard de Chardin « Le phénomène humain. »
- Robert Misrahi « Le bonheur. Essai sur la joie. »
- Gabriel Madinier « Conscience et Signification. »
- Gary Madison « La phénoménologie de Merleau-Ponty, une recherche des limites de la conscience. »
- Derek Denton « Les émotions primordiales et l’éveil de la conscience. »
Yannick FRIEH
Directeur de l’Ecole de Sophrologie et de Sophrothérapie d’Alsace-Colmar E.S.S.A.
Co-directeur de l’Ecole de Sophrologie et de Sophrothérapie Existentielle Bordeaux-Aquitaine I.S.E.B.A.
Sophrothérapeute titulaire du Certificat Européen de Psychothérapie C.E.P.
Psychopraticien en Sophrologie Existentielle FF2P
Membre de la Société Française de Sophrologie S.F.S.
Administrateur et Délégué de la Fédération Française de Psychothérapie et de Psychanalyse F.F.2.P.